Siné Saloum
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Vu de Paris et de nos quelques semaines de vacances annuelles, notre voyage de deux ans nous paraissait offrir d'innombrables perspectives. Déjà, les rencontres faites sur l'eau avec nos congénères, pressés de nous condamner de consacrer aussi peu de temps à une aventure qui en mérite beaucoup plus, nous laissaient pressentir que nous n'en vivrions qu'un “aperçu”. Sur le Sine Saloum, ce fleuve d'eau de mer dont l'embouchure est située à une centaine de kilomètres au sud de Dakar, force fut de constater combien ils ont tous raison. Nous avons pu rester 4 jours seulement dans ces paysages sublimes, le temps de livrer le matériel médical que nous avions embarqué pour Voiles sans Frontières.
Cette association a été créée par un ex grand voyageur, frappé de voir dans quel isolement les villages de Casamance et du Siné Saloum sont plongés. Elle organise donc des collectes de fonds, de médicaments et de matériel scolaire, acheminés depuis la France par des bateaux comme le nôtre. Puis, elle pilote des missions scolaires ou médicales réalisées par des bénévoles, qui effectuent des consultations de médecine générale, dentaires ou ophtalmo dans ces villages accessibles uniquement par la mer.
Nous avons donc lentement remonté ce fleuve et ses bolongs (ses bras de mer) bordés par la mangrove, sur laquelle se posaient des nuées de pélicans, d'oies cendrées, de hérons et autres somptueux échassiers que nous sommes malheureusement incapables de reconnaître. Tout ce spectacle ne pouvait être observé que d'un oeil, l'autre servant à scruter très attentivement la surface de l'eau pour y détecter les nombreux bancs de sable entre lesquels nous devions slalomer.
Nous étions attendus par Antoine Rongères, un vieux monsieur medecin qui passe deux mois par an au Sénégal pour VSF.
Il est venu nous chercher en pirogue pour nous montrer le chemin et nous aider éviter les bancs de sable du bolong de N'Dangane. Là, à peine arrivés, son taxi nous emmena chez lui où nous étions attendus pour déjeuner.
Chez lui, c'est en fait chez Radi-Yann. Cette femme sans âge (comme tous les sénégalais elle a cette peau lisse qui leur donne un air éternellement jeune) est à la tête d'une concession. C'est ainsi qu'on appelle l'endroit où vit une famille. On y trouve une ou plusieurs cases avec des chambres, une case pour la cuisine, une pour les sanitaires, et au milieu de celles-ci, bien souvent, l'arbre à palabres et le puits si la concession en a un.
La plupart des concessions sont “tenues” par le chef de famille. Y vivent ses femmes, leurs enfants, les cousins ou vieux oncles rattachés à la famille. Cela représente parfois jusqu'à une cinquantaine de personnes.
Chez Radi-Yann, mariée deux fois dont une fois à un Hollandais de qui elle a eu deux enfants, impossible de savoir vraiment qui habitait là. Au fil des heures de la journée, passaient les uns ou les autres, qui pour faire une simple visite, qui pour déjeuner ou prendre un thé.
A peine arrivés, nous avons été chaleureusement accueillis par un homme (jeune, forcément), qui a pris le soin de nous faire visiter les lieux. Nous apprendrons plus tard qu'il est un des nombreux frères de Radi-Yann, même père même mère prend-il la peine de nous préciser. Et pour cause, son père a plus de vingt enfants, il ne sait pas combien exactement, de trois femmes différentes. Nous apprendrons aussi plus tard que cet homme si disponible pour nous est l'heureux père d'un petit garçon depuis 6 heures seulement. Mais comme le dira Antoine Rongères, c'est tellement plus palpitant de passer une journée avec des touristes français qu'auprès de sa femme !!
Nous découvrons donc la concession à ses côtés. La simplicité des lieux, à nos yeux, ne doit pas nous tromper. Radi-Yann fait partie des familles aisées du village. Toutes les cases sont construites en dur, contrairement à la plupart de celles que nous croiserons en route. La concession est plantée de multiples arbres fruitiers : manguiers, citronniers, pamplemoussiers, goyaviers et pommiers d'acajou (pour les noix de cajou) qui assurent à la famille des revenus honorables. Radi-Yann loue aussi quelques unes de ses cases à ceux qui comme Antoine et l'infirmière qui l'aide ont ponctuellement besoin d'un logement.
Puis vint l'heure de passer “à table”. Des nattes furent dépliées à l'ombre de l'arbre à palabres, Fabien, Hugo et moi prirent place sur des chaises autour de la “natte d'honneur” avec Antoine, Radi-Yann et son frère, pendant que les filles (les nôtres et celles de Radi-Yann), sa soeur et deux hommes, dont nous n'avons jamais su qui ils étaient, s'installaient par terre sur l'autre natte.
Le plat commun fut apporté et placé au milieu de nous tous. Nous eûmes la faveur d'utiliser des cuillers pendant que nos hôtes se servaient avec leurs mains à même le plat, tout ce qui chez nous est interdit ! Ce fut délicieux ...
Après-midi : sieste sous les arbres et initiation aux techniques et traditions locales. Ce que les photos ne disent pas, c'est que le seau était plein d'eau, garantie d'une motivation certaine pour toutes nos tentatives. Nous les avons bien fait rire, surtout Fabien et Hugo car ici seules les femmes portent ainsi des choses sur leur tête. Nous repartîmes en fin de journée, après avoir longuement attendu Mahault et Sissi, parties en cariole avec les deux petites filles de la maison faire un tour de village. Elles seront allées rendre visite à ce bébé tout neuf, goûter du mil pillé par une femme du village et auront conduit elles-même la cariole à travers la brousse. Que de souvenirs !!
Djiffer,le port d'entrée sur le Saloum
arrivée à N'Dangane
Sissi sur fond de mangrove
Au milieu de la concession s'ébattent poules, dindons et oies qui finiront tôt ou tard dans les assiettes de la famille. Ou plutôt dans la grande bassine qui lui sert de plat commun. Ce fut là encore une nouvelle expérience pour nous.
Arrivés vers midi, nous avons eu le plaisir d'assister aux préparatifs du repas. En tant qu'invitée, je ne fus malheureusement pas autorisée à tenir compagnie aux femmes pendant qu'elles vidaient les poissons, épluchaient les crevettes ou les légumes et faisaient cuire le riz. Sissi a eu plus de chance que moi et participa, elle, activement à l'élaboration de notre déjeuner, ramassant les citrons, épluchant les crevettes, pilant les oignons pour nous préparer un délicieux poisson Yassa.
Débarquement du matériel, La ligne de flotaison remonte, Fabien sourit ...
Puis débarquement des passagers
Antoine Rongères, Mahault près d'une termitière 2 fois grande comme elle et Annabel sous l'arbre à palabres (j'adore ce concept, il faudra nous trouver un coin à palabres à notre retour)
Les femmes devant la case “cuisine, un feu de bois sur lequel sont posées les marmites. Radi-Yann est en jaune. Sa soeur, en bleu, vit chez elle et lui sert de bonne à tout faire en attendant d'être mariée
Nous quitterons le Saloum deux jours plus tard, après une halte divine dans un campement (c'est ainsi qu'on appelle les petits hôtels de cases situés dans les villages) le long du bolong : “le Bazouk du Saloum”. Nous le recommandons chaudement à tous ceux qui souhaitent à la fois se reposer, se baigner et découvrir la vie d'un village assez préservé, Mar Lodge, duquel peuvent être organisées des visites en pirogues sur les bolongs, des séances de pêche avec les habitants ...
Anne-Marie, une des petites filles de la concession.
Radi-Yann et sa soeur après leur métamorphose : splendides, elles partaient à un baptême et s'étaient parées de leurs bijoux et leurs chaussures à paillettes
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Une dernière halte le long de l'île déserte de Sangomar, située à l'entrée du Delta, le temps de prendre un merveilleux bain de rouleaux côté Atlantique et d'apercevoir de somptueux de couchers de soleil sur les baobabs, puis nous avons mis les voiles direction la Casamance ...
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